C’est lors du Camper Van Week-End, à Chantilly (60), que nous rencontrons Miary Huet. Calme, l’air affable et souriant, il est habillé d’une grosse écharpe douillette, d’un pull en laine et d’une casquette en polaire. Nous sommes en octobre 2024, il vient de rentrer en France après avoir passé des mois sur les routes, mais ses yeux semblent dire que son esprit est encore dans les plaines asiatiques qu’il a “tout juste” quittées…
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Un premeir voyage au Japon et un goût de reviens-y
Pour comprendre sa soif de voyages, il faut revenir en 2018. Cette année-là, Miary part vivre un an à Tokyo, au Japon : “J’ai adoré ce pays et je me suis dit qu’il fallait que je le visite en fourgon”, se rappelle-t-il. De retour en Région parisienne, d’où il est originaire, il mûrit le projet d’un voyage de plusieurs milliers de kilomètres pour rallier le pays du Soleil-Levant par la route. L’histoire a commencé avec un vieux fourgon Mercedes sur lequel il s’est “fait les dents” : “Je n’étais pas bricoleur. Pour l’aménagement, j’ai tout appris à travers des tutoriels vus sur YouTube. J’ai réalisé deux aménagements différents… avant de me rendre compte que le véhicule lui-même n’était pas adapté à un tel périple”, remarque l’aventurier en devenir.
Changement de plan. Après avoir revendu son Mercedes TN, il acquiert un Nissan Patrol Y60 avec 225 000 km au compteur. Un 4x4 japonais, bien sûr : “Je l’ai acheté 8 500 € et j’ai investi 2 250 € dans des pièces pour préparer et optimiser la mécanique, puis j’ai aménagé le 4x4 en bois et en équipements (3 500€) pour pouvoir dormir, manger dedans et recharger mes outils informatiques.” Avec ce tout-terrain passe-partout et au gabarit raisonnable, Miary peut sortir des sentiers battus et s’aventurer sur des terrains moins carrossables. Un choix qu’il ne regrettera pas.
Le grand départ
Un voyage de plusieurs mois se prépare, bien sûr, mais se finance aussi. Pour assurer la pérennité budgétaire de son projet, Miary mêle plusieurs activités : créateur de sites internet, chorégraphe et influenceur. “Lorsque j’ai annoncé sur Instagram que je partais pour le Japon, le nombre de followers s’est multiplié (il en compte aujourd’hui 170 000). Cela m’a permis de faire de la publicité sur mon compte, essentiellement pour des produits en lien avec la vanlife”, explique-t-il.
En décembre 2023, c’est le grand départ, le début du voyage. Les premiers kilomètres dans les méandres de l’Europe permettent de tester l’aménagement en bois et la mécanique qu’il a soignée pendant des mois : “C’était la première fois que je voyageais dans un espace si réduit. En plus, les conditions hivernales ajoutaient à la difficulté”, confie-t-il. Puis son chemin croise celui d’autres voyageurs, en particulier en Slovénie où il tombe amoureux des paysages. Sa copine le rejoint alors pour traverser la Croatie et le Monténégro. Cap, ensuite sur l’Albanie, la Grèce et la Turquie, porte d’entrée de l’Asie. “C’est à partir de là que les gens se sont montrés les plus accueillants. En Géorgie, j’ai découvert des panoramas somptueux et rencontré beaucoup de Russes en exil, qui souhaitaient une autre vie”, détaille-t-il.
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Puis vint la Russie…
Pour rejoindre le Kazakhstan, de l’autre côté de la mer Caspienne, Miary doit passer par la Russie. Pas des plus simples au vu du contexte géopolitique d’alors (le conflit ukrainien dure depuis plusieurs mois déjà) : “À la frontière, les douaniers m’ont beaucoup questionné, ils m’ont demandé si j’étais un espion et ont même pris mon téléphone. Une fois sur le territoire, j’ai subi deux contrôles par les militaires, en moins de 40 minutes”, se rappelle-t-il. Un climat délétère qui le plonge dans un état de stress quasi permanent. De plus, les territoires qu’il traverse sont, à majorité, sans relief et les villes peuplées de buildings et de mosquées, semblables les unes aux autres. Heureusement, en quelques jours le Français entre au Kazakhstan. Un autre monde ! “Ce pays est mémorable. À cette période, la neige recouvrait l’entièreté du paysage, me donnant la sensation d’être en Alaska. Là, je me suis dit que l’aventure commençait vraiment. J’ai rencontré quelques personnes et j’ai pu passer plusieurs semaines en vivant chez une famille”, se souvient le vanlifer.
Alors que la suite du périple doit l’emmener dans les steppes mongoles, Miary est épris de doutes : “Je devais repasser en Russie. Et à ce moment, les tensions géopolitiques étaient exacerbées. En y retournant, je prenais le risque de rester bloqué dans le pays et cela me générait beaucoup de stress, d’autant plus que j’étais seul dans cette aventure”, se remémore-t-il. En août 2024, la mort dans l’âme, il prend la décision de renoncer au Japon, son but, et de faire demi-tour. Pour autant, sa route l’oblige tout de même à passer de nouveau par la Russie. Avec une nouvelle poussée d’anxiété à la clef. “Je ne vivais plus normalement. Je pensais donc que renoncer à ma destination était, alors, la meilleure solution pour mon bien-être”, affirme-t-il d’une voix posée. Lors de sa traversée russe, Miary est sujet à six contrôles militaires routiers en trois jours. La nuit, il quitte les grandes routes rectilignes pour bivouaquer dans la nature, à l’abri des regards. Une angoisse permanente, jusqu’à l’arrivée en Géorgie, qui l’ébahit à nouveau. Cependant, ses proches lui manquent et toutes ses récentes expériences fortes en émotion l’assaillent et il n’a pas envie de s’éterniser. En un mois et demi, Miary avale les plus de 4 000 km qui le séparent de la Région parisienne, en jouant la sécurité : “Je suis passé par des pays que je connaissais afin d’éviter le stress. Et le 9 octobre, j’étais de retour en France.”
Partie remise ?
Au Camper Van Week-End, Miary avoue ne pas envisager se relancer, dans l’immédiat, dans une expédition d’une telle envergure. Il tire avec sagesse les enseignements de cette première tentative : “Je pense avoir négligé le côté mental lors de ma préparation : la solitude m’a pesé et parfois empêché de profiter. L’aventure est tout de même plus drôle à deux.” Dans les moments de grande solitude, le jeune homme a pu s’appuyer sur le soutien de sa communauté. Un réconfort inattendu qui fait partie des très bonnes surprises de son projet, qui n’en a pas manqué malgré son goût d’inachevé. D’ailleurs, il nous confiera tout de même “ne pas exclure l’idée de retenter un France-Japon à la fin du conflit ukrainien.”
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