A la découverte de la Villa Cavrois, chef d'œuvre architectural signé Robert Mallet-Stevens

Fleuron de l’architecture avant-gardiste des années 1930, la villa Cavrois a bien failli disparaître sous les coups des pelleteuses. Heureusement, elle se dresse toujours face à nous, témoin de la maîtrise de son concepteur, le franco-belge Robert Mallet-Stevens. Une “capsule temporelle” en plein cœur de Hauts-de-France dont la modernité laisse encore pantois.

  • © Didier Plowy
  • Chambre des parents © Didier Plowy
  • Boudoir de Mme Cavrois © Didier Plowy
  • Bureau de M. Cavrois © Didier Plowy
  • Salle à manger des enfants © Didier Plowy
  • Salle de bain des parents © Didier Plowy
  • Office © Didier Plowy
  • Chambre de jeune homme © Didier Plowy
  • Façade sud © Didier Plowy
  • Vestibule © Colombe Clier
  • Robert Mallet-Stevens
© Didier Plowy
Chambre des parents © Didier Plowy
Boudoir de Mme Cavrois © Didier Plowy
Bureau de M. Cavrois © Didier Plowy
Salle à manger des enfants © Didier Plowy
Salle de bain des parents © Didier Plowy
Office © Didier Plowy
Chambre de jeune homme © Didier Plowy
Façade sud © Didier Plowy
Vestibule © Colombe Clier
Robert Mallet-Stevens

En arpentant la proprette, mais impersonnelle avenue du Président-John-Fitzgerald-Kennedy, à Croix, dans la banlieue de Roubaix, difficile d’imaginer que s’y cache l’un des joyaux de l’architecture moderniste. Pourtant, la villa Cavrois vous y attend bel et bien, au numéro 60. Et une fois l’entrée du domaine passée, elle vous surprend par ses dimensions, vous impressionne par sa prestance et son étonnante évidence. Prenez le temps de la mettre en perspective et stationnez devant le perron, grâce à votre imagination, une Bugatti Type 35 ou une Automobiles Voisin des années 1930. Anachroniques ? Non. Des contemporaines à même de recadrer votre perception de la modernité du lieu. Car la très actuelle villa Cavrois a été inaugurée en 1932.

L’architecture moderniste – part importante du mouvement européen du même nom qui naît avec la révolution industrielle (fin du XVIIIe-début XIXe siècle) – trouve son apogée dans l’entre-deux-guerres grâce, entre autres, à l’arrivée de nouveaux matériaux et processus de construction, comme le béton armé. En France, Le Corbusier et Robert Mallet-Stevens en sont les chefs de file. C’est ce dernier qui concrétise le souhait de Paul Cavrois, industriel textile roubaisien, d’une “demeure pour une famille nombreuse (…) vivant en 1934 : air, lumière, travail, sports hygiène, confort, économie”, tel que l’architecte le retranscrit dans son livre consacré à la villa, Une demeure 1934. Elle reste son œuvre majeure, son acmé, tant la maîtrise de tous les aspects, du gros œuvre à l’infime détail, la gestion entre harmonie esthétique et praticité quotidienne, sont totales. En foulant le gravier de l’allée, apprenez que la villa a connu une deuxième naissance, en 2015. Après une première vie mouvementée qui a bien failli être la dernière…

 

Robert Mallet-Stevens
Robert Mallet-Stevens

 

Quinze ans de restauration

D’abord transformée en caserne pour 200 Allemands, pendant la seconde guerre mondiale, scindée en deux à la demande de la famille – qui en reprend possession entre la fin du conflit et 1985 –, elle est revendue à un promoteur en 1987. Un destin funeste, que la municipalité de Croix refuse l’année suivante. Sauvée des pelleteuses, mais pas de l’effet du temps, des intempéries, des squatteurs et autres pilleurs de matériaux, et malgré son classement au titre des Monuments historiques en 1990, elle se dégrade rapidement. Jusqu’à ce que l’état la rachète au début des années 2000 et en confie l’impressionnant chantier de restauration au Centre des monuments nationaux. Car il ne suffit pas de refaire murs, fenêtres et toits-­terrasses. La villa a été élaborée comme un tout, avec son mobilier – dispersé dans les années 1980 –, ses commodités ou ses éclairages. Le travail, en partie aidé par les écrits de Robert Mallet-Stevens, est quasi archéologique : recherche de restes de carrelage ou de parquets, d’essences de bois pour les meubles, de peintures d’origine… Imaginez que les briques beiges, recouvrant l’intégralité de la demeure et exigées par Paul Cavrois (les autres œuvres de Mallet-Stevens affichent leur béton simplement peint), ont été spécialement conçues pour elle et, surtout, que 26 moules différents ont été nécessaires afin d’épouser les murs extérieurs, angles ou renfoncements, sans altérer la régularité des joints. Titanesque !

 

 

Une merveille d'architecture moderniste

Les premiers visiteurs peuvent enfin entrer dans la villa Cavrois en juin 2015. Dès le vestibule, la villa impressionne : large escalier et grandes boîtes à lumière vous accueillent, avant de pénétrer dans l’immense hall-salon (plus de 7 mètres de hauteur sous plafond) qui offre un coin cheminée décaissé ainsi qu’une superbe vue sur le parc et son miroir d’eau. Escalier monumental, suite et salle de bains des parents, chambres et salle de jeux des enfants, ou encore bureau et fumoir de Paul Cavrois ou boudoir de madame, jusqu’à la cuisine et l’office, chaque pièce étonne par son esthétique, ses aspects pratiques et, par-dessus tout, sa modernité. Elle recèle également nombre d’équipements novateurs pour l’époque : radio, téléphones et horloges synchronisés dans quasiment chaque pièce, adoucisseur d’eau, chauffage central, sèche-linge, couloir de nage, éclairages indirects intégrés dans le bâti… La remise en état d’origine est toujours d’actualité. La table et le tapis de la salle à manger ont repris leur place en 2022, tandis que le remeublement continue (dernière acquisition en date, celle d'une table signée Mallet-Stevens). La villa Cavrois ne vous a pas encore dévoilé tous ses secrets.

 

Infos pratiques

Villa Cavrois, 60 avenue John Fitzgerald Kennedy, 59170 Croix

Ouvert tous les jours sauf lundi, 1er janvier, 1er mai et 25 décembre de 10 h à 18 h.

Tarifs : 11 €, gratuit pour les moins de 25 ans, personnes handicapés et demandeurs d'emploi.

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